La guerre de mouvement est terminée ; place à la guerre de position, aux tranchées.
Ce dernier mot revient de plus en plus souvent dans les courriers adressés par les soldats à leurs proches. Comment imaginer la vie dans une tranchée quand on est à l’arrière et que les principaux témoins en cachent la dure réalité pour ne pas affoler ou parce que la censure veille ?
La propagande va se charger d’informer les civils.
Le 22 décembre, Le Phare publie un long article, illustré d’un plan, intitulé : « La vie des tranchées ». Sous forme d’une lettre envoyée par un soldat x… le journaliste décrit « à peu près tout ce qu’on peut faire dans cette vie peu banale des tranchées ». Suit une description de la tranchée idéale avec poste de commandement, abris, casemates, cuisines… reliés par des couloirs, boyaux… Tables, chaises, lits, porte-manteaux, garde-manger… assurent un confort qu’envient les voisins d’en face installés « dans des trous ». Malheur à eux s’ils sortent de ces trous ; ce sera pour subir : « un massacre épouvantable ». Quand ils s’y risquent, les survivants de ce massacre ont la bonne idée de tomber dans la belle tranchée française : « On les interrogea. Ils sont dans un état lamentable, ils en ont assez, ils ont des pertes fantastiques et marchent comme des bêtes à la boucherie ».
Pour parachever cette œuvre de « bourrage de crâne », Le Phare du lendemain présente en première page un long article intitulé : « Le triomphe de la tranchée ». Il y présente les avantages et les inconvénients de ce « nouveau mode de guerre ». Le journaliste écrit : « L’homme, dans cette nouvelle forme de guerre, tend donc à se fixer au sol, c’est l’inconvénient de la tranchée ; plus celle-ci est confortable, plus il a de la peine à en sortir ».
C’est une façon de préparer l’opinion à une guerre longue ; les « Poilus » aiment tellement leur confort !! Pas sûr qu’ils aient apprécié.