samedi, 22 avril 1916

Le quotidien de l’ambulance

A l’ouest et à l’est de Verdun, les Allemands continuent leurs attaques sur le Mort-Homme et sur Vaux. « Une autre attaque, avec emploi de liquides enflammés, a été lancée sur nos tranchées au nord du bois des Caurettes… » indique le communiqué officiel du 22 avril.

 

Ce jour-là, de son ambulance, en retrait des premières lignes, Alphonse de Châteaubriant écrit à son épouse :

 

«  Nous n’avons pas quitté nos positions, et notre vie continue d’être particulièrement pénible. Nos épreuves de Belgique et d’Argonne, peut-être parce qu’elles sont passées, nous paraissent pâles à côté de ce que nous endurons. Nous barbotons dans un marécage innommable, battu en crème par les véhicules et les pieds de millions de chevaux. Nous couchons toujours dans notre trou de terre baigné d’humidité. Beaucoup de chevaux sont malades et crèvent. Il pleut continuellement. Nous sommes couverts de boue, et impossible de se nettoyer. C’est une dure vie ».

 

 

Louis Vuillemin, autre ancien élève du Lycée de Nantes donne une vision plus crue de l’ambulance :

 

« Elle est aujourd’hui l’endroit du monde où l’on sonde le plus totalement les misères de l’humanité. L’endroit où seul le malheur règne sous deux apparences invariables : la souffrance physique ; la souffrance morale.

L’ambulance, c’est là qu’on apporte surtout les soldats que la balle, l’obus ou la torpille ont malheureusement ratés. Les soigner ? C’est inutile. Les évacuer serait barbare. Ils mourraient sur le brancard, dans l’auto ou le wagon. Au poste de secours, ils encombrent. Alors, on leur fait une piqûre anesthésique. Ils attendront à l’ambulance qu’on puisse enfin les enterrer ».