Centenaire du discours d’investiture de Georges Clemenceau à la Chambre du 20 novembre 1917

Le Lycée Clemenceau a organisé une cérémonie, en présence et sous le haut patronage du Recteur William Marois, le 20 novembre dernier, à l’occasion du centenaire du discours d’investiture de Georges Clemenceau à la Chambre le 20 novembre 1917.

 

Outre la présence de Monsieur le Recteur, le public, essentiellement composé d’élèves de Première et de Seconde et de professeurs du lycée, est également émaillé de deux inspecteurs pédagogiques régionaux d’Histoire-Géographie, de représentants de l’Amicale des Anciens de Jules Verne et de Clemenceau et du Comité de l’Histoire du Lycée Clemenceau ; enfin, l’ancien proviseur du lycée nous fait, lui aussi, l’honneur de sa présence.

 

 

Corinne Raguideau, proviseur, rappelle tout d’abord à l’assemblée en quoi le Lycée Clemenceau, premier lycée éponyme de France, reste attaché par des liens tout particuliers au grand homme ; à cette fin, elle cite les mots de Georges Clemenceau, ancien élève de l’établissement, lorsqu’il revint sur les lieux de ses humanités pour inaugurer le Monument aux Morts de la Cour d’Honneur, le 27 mai 1922 – propos savoureux qui ne peuvent que faire écho chez ce public d’élèves de 2017 :

 

« Je suis venu vous apporter ici le témoignage d’une vie tourmentée qui a reçu la plus belle récompense le jour où j’ai eu la fierté de lire mon nom sur la façade de votre lycée. Oui, j’ai passé par ce vieux lycée moisi où la verdure des arbres était de la mousse en hiver…

En ferai-je l’aveu ? J’étais très content quand j’ai quitté le lycée. On ne m’avait pas rendu bien malheureux pourtant et je reconnus plus tard que les principaux ennuis n’étaient dus qu’à moi-même et je me suis pris à aimer trop tard de bons maîtres que j’avais mal appréciés. Il vous arrivera de même, à vous aussi. Pour se rendre compte de ce passé, il faut apprendre la vie, il faut avoir pris part à la grande lutte qui attend les enfants à la porte du lycée…

Nous allons nous quitter, moi pour aller à ma fin, vous pour devenir des hommes, des hommes français dignes de votre histoire. Oubliez-moi, vous que je garderai dans mon souvenir. Mais pour connaître par vous-mêmes, sans attendre l’avenir, la fortune de vos efforts, retroussez résolument vos manches et faites votre destinée. »

Cette dernière phrase, les élèves du lycée peuvent la relire à l’envi chaque jour en passant sous le porche de la Cour d’Honneur, où ils sont gravés dans le marbre d’une plaque commémorative…

 

Le Recteur Marois prend ensuite la parole pour ouvrir la cérémonie ; il rappelle à cette occasion, en quelques mots, le passage de Georges Clemenceau au lycée, de 1852 où il entre en classe de 5ème, jusqu’en 1858 où il y obtient le baccalauréat es lettres.

 

Huit élèves de Première littéraire et de Première économique, qui suivent l’option théâtre du lycée, font alors une lecture théâtralisée de larges extraits du discours de Georges Clemenceau. Les deux classes ont préalablement étudié en histoire « L’expérience combattante dans une guerre totale », situé le discours dans son contexte ainsi que le parcours de Georges Clemenceau, notamment sa jeunesse.

Chaque élève – Baptiste, Maëlie, Zoé, Evelyne, Camille, Laura, Marie et Elisa – lit et joue un extrait, une élève jouant le rôle de « présentateur », les sept autres se succédant sur la scène jusqu’à former un chœur et terminer ensemble la lecture, ponctuée d’interventions de « députés » répartis dans la salle, comme ce fut le cas à la Chambre en 1917. Le chœur se mue progressivement en un monument aux morts très réussi. Bravo aux élèves, qui ont su en très peu de temps donner vie à ce discours et en faire un moment enthousiasmant en même temps qu’émouvant, très apprécié de l’ensemble du public.

 

Damien Accoulon, doctorant, agrégé d’Histoire, fait ensuite une conférence de très grande qualité, dans laquelle il traite la problématique suivante : « dans quelle mesure ce discours constitue-t-il un tournant de la Première Guerre mondiale ? En quoi participe-t-il de la légende du « père la victoire » ?

Partant du postulat de J.-J. Becker dans Clemenceau chef de guerre (Paris, A. Colin, 2012) : « sans la guerre, Clemenceau n’aurait été qu’un homme politique important de la Troisième République, oublié évidemment. », Damien Accoulon articule son propos autour des trois idées maîtresses suivantes : un discours pour obtenir la confiance du Parlement ; le discours d’investiture du Tigre : la critique des embusqués et des traîtres aux commandes de l’Etat ; choisir « la guerre intégrale » plutôt que la subir.

La conférence est unanimement saluée et longuement applaudie ; en effet, à la maîtrise du fond, Damien Accoulon sait habilement y allier la simplicité de la forme ; c’est pourquoi le public se trouve rapidement tout acquis à sa cause ; pour preuve l’attention, remarquable, d’élèves encore peu habitués à entendre des universitaires. De retour en classe, d’ailleurs, ils salueront le travail de M. Accoulon.

 

De ce fait, les questions sont nombreuses et pertinentes, autour du parcours d’études de Damien Accoulon (vie de l’étudiant doctorant, choix de son sujet) et bien sûr de ce discours, de la légende de Clemenceau, de la légitimité d’une telle commémoration.

Parfois même joliment impertinentes : « pourquoi continuer à donner à un lycée le nom d’un personnage aussi controversée que celui que vous présentez ?… » M. Accoulon répond bien volontiers et de façon très complète à toutes : un beau moment de « démocratie parlementaire » au sein du lycée !

 

Le Recteur, contraint de quitter l’assemblée avant la fin, prend néanmoins le temps de s’attarder sur le fameux Monument aux morts de la Cour d’Honneur du lycée, inauguré par Georges Clemenceau soi-même en mai 1922 et de lire l’inscription qui y est portée et rappelle ce bel évènement.

 

 

Corinne Raguideau

 

Voir aussi le reportage-photo à l’onglet « Notre Actualité / Evénements / 26 novembre 2017 »