« Après déjeuner j’ai été visiter le champ de bataille de Bertrix, où ma 33e D.I. avait été écrasée en août 1914… On est obligé de reconnaître que les Allemands ont très bien entretenu nos tombes, aussi bien que les leurs » écrit le général Guillaumat à son épouse.
Mais tout le monde ne fait pas confiance à l’ennemi vaincu pour entretenir les tombes des prisonniers français inhumés en Allemagne.
Dans Le Phare du 26 décembre on peut lire sous le titre « Nos morts en Allemagne » :
« Ils sont ainsi des milliers qui reposent dans la terre étrangère, soit dans les cimetières des camps, soit dans les cimetières allemands. Les prisonniers en Allemagne ont entretenu pieusement, jusqu’à présent, les tombes de leurs camarades. Mais eux rapatriés, qui va continuer à garder la sépulture de nos morts ? Nous ne devons pas laisser ce soin à l’adversaire… ».
Effectivement, les corps de 22 000 prisonniers de guerre décédés en Allemagne au cours de leur captivité furent rapatriés puis transférés à la nécropole nationale des prisonniers de guerre à Sarrebourg (Moselle).
Pourtant, par le traité de Versailles (28 juin 1919), reprenant les mesures du traité de Francfort qui avait mis fin à la guerre de 1870-1871, les anciens belligérants s’engageaient à entretenir les tombes des soldats ensevelis sur leurs territoires respectifs. Il existe aujourd’hui des nécropoles allemandes, anglaises, américaines, canadiennes, australiennes, néo-zélandaises… en France et les carrés militaires des cimetières communaux contiennent, comme c’est le cas du cimetière de La Bouteillerie à Nantes, des tombes allemandes, anglaises, belges… Elles sont entretenues selon le même régime que les tombes françaises.
Plus qu’une question de confiance, l’inhumation dans le sol national des soldats français morts prisonniers en Allemagne répondait, pour les familles, à la volonté d’en faire des combattants « Morts pour la France » et de lever l’ambigüité pesant sur le soldat-prisonnier.
La nécropole nationale de Sarrebourg dans les années 1920 ;
carte postale du souvenir Français.