Le général Buat écrit dans son Journal :
« Un paquet de comptes rendus sur l’état moral des diverses unités des armées – état moral révélé par le contrôle des correspondances – est sur ma table. La lecture en est peu réjouissante. Il est évident que la tenue morale des armées baisse de plus en plus. Naguère encore, on ne trouvait qu’exceptionnellement la mention : « moral assez bon ». C’est maintenant la grande majorité ; on ne trouve que rarement : « moral bon », et les annotations « moral passable » et même « médiocre » deviennent de plus en plus nombreuses. A quoi attribuer ce revirement ? Incontestablement, à la longueur des négociations, à l’incertitude des hommes sur la date de leur libération, au marasme dans lequel sont plongés les officiers qui, eux, ne savent ni où ils iront, ni ce qu’ils deviendront, ni surtout avec quoi ils vivront – eux et leur famille – si les soldes demeurent ce qu’elles sont actuellement, c’est-à-dire inférieures au salaire de la plupart des ouvriers, il y a là un grand danger contre lequel personne ne peut lutter, car on ne catéchise pas des gens que guette la misère ».