Carte de sucre, carte de charbon, chaussure nationale, pain rassis… la liste des privations s’allonge chaque jour.
Mais au royaume de la pénurie, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne comme en témoigne le commissaire spécial de police de Nantes dans un courrier au préfet :
« Dans les centres industriels les difficultés économiques et de main d’œuvre, la cherté de la vie et les restrictions donnent lieu à de commentaires des plus divers : les uns critiquent d’autres maugréent d’autres, plus sensés, acceptent sans récriminations comprenant avant tout l’obligation de cette situation consécutive de l’état de guerre ; mais ils demandent la restriction pour tous et au même titre.
A la campagne la même mentalité règne avec cette différence que, tout en éprouvant une grande gêne, certains cultivateurs, par la vente sans cesse croissante des produits de la terre et de la ferme, amassent et remplissent leur bas de laine. Profondément égoïstes, ils ne s’inquiètent pas outre mesure des calamités de la guerre qui leur procure ainsi de beaux bénéfices. Ils regrettent cependant que certains des leurs ne soient plus à la ferme pour activer les travaux agricoles, mais, l’intérêt leur fait vite oublier ce manque de bras pour ne plus songer qu’à amasser et devenir à leur tour propriétaires des terres qu’ils cultivent ».
Dans l’immédiat après-guerre, le marché foncier connaîtra une activité inhabituelle qui aboutira à de nombreux transferts de propriété au bénéfice des exploitants.