En 1914, Albert Poumailloux, bientôt 21 ans, vient d’être reçu à L’Ecole Polytechnique après des études au Lycée de Nantes. Il est mobilisé le 11 août au 93e de ligne, à La Roche-sur-Yon. Il écrit dans son journal :
« On m’a donné un pantalon rouge neuf, une superbe petite veste bleue magnifiquement usagée, à laquelle manque de-ci, de-là, un bouton, mais qui me sied comme un gant Perrin sur mesure ! Je me suis laissé attribuer une paire de superbes godillots tout neufs encore ! une capote, qui a bien dû laisser son teint sur le dos de vingt générations successives, et qui est toute vénérable de ses années de labeur et de campagnes. »
Le café du matin à la caserne est pour Albert Poumailloux l’occasion d’y tremper sa « madeleine de Proust » : « Le jus – J’en ai goûté de ce café fameux : il ne m’a point paru différer notablement de celui que je prends depuis tantôt dix ans sur les bancs du lycée… »
« Et pendant ce temps, là-bas, à l’Est, je compte des amis très chers qui s’exposent au danger… Le reverrai-je jamais mon excellent ami Brunet, ce vieux Fernand qui fut mon camarade de Taupe à Nantes […] ? Les retrouverai-je encore, après la guerre, tous ceux qui m’ont dépassé d’une année dans la grande Ecole : Bouteloup, le brillant Carcopino, le major de cette année dernière, et Hême ? Ils sont allés en première ligne comme simples artilleurs. Ils sont moins exposés cependant que mes camarades de l’année précédente, qui sont allés au feu comme officiers d’artillerie : Perraud, Martin, Lemonnier. – Ils font là-bas tonner le canon. »
in Impressions de Guerre d’Albert Poumailloux, pp. 10-12.